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COMPAGNIE DIGNITE

Comment la criminologie peut elle contribuer à la réduction de la criminalité en HAÏTI ?

L’Etat a pour responsabilité principale de garantir le bien-être de tousses concitoyens. La sécurité de ces derniers relève des fonctions régaliennes de l’Etat qui détient le monopole de la contrainte physique légitime. Pour ce, il se donne des instruments juridico légaux et des organes répressifs. En Haïti, on assiste depuis plusieurs décennies à un affaiblissement total de l’Etat. Certains parlent même d’effondrement de l’Etat. Et depuis, les crimes sont accrus, et conduit le pays dans le chaos. Ce chaos profite aux criminels qui, regroupés en des gangs armés, divisent le pays en caciquats s’érigent en caciques, c est à dire en maîtres. Actuellement, les groupes criminels contrôlent près de 80% de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, la capitale d’Haïti. L’Etat fuit ses responsabilités et est même contraint d’abandonner les lieux où sont logés ses institutions les plus importantes et les plus prestigieuses, pour échapper à la fureur des groupes criminels. Le palais national, siège de la présidence, la plus haute autorité de l’Etat ne joue plus ce rôle de plus de 3 ans. Nos conseillers présidents siègent à la villa d’accueil, devenue de fait le siège de la présidence. La résidence du premier ministre siege de fait la primature dont les locaux sont abandonnés depuis plusieurs années. Nombreux sont les ministères, les organismes autonomes et d’autres entités étatiques qui sont contraints d’être logés dans des maisons privées louées au prix fort comme bureaux de fortune, les gangs ayant le plein contrôle des zones où sont situés les locaux de ces institutions de l’Etat. Le symbolisme qui caractérise l’Etat tend à disparaître dans le cas d’Haïti.

Comment en est-on arrivé là?

La criminalité s’installe graduellement chez nous jusqu’à devenir maître des lieux. Elle résulte de l’affaiblissement de l’Etat, des inégalités sociales criantes, de l’interconnexion des réseaux criminels spécialisés dans le trafic illégal d’armes, de munitions et de stupéfiants à l’échelle mondiale, de l’incapacité de nos élites à assumer pleinement la vocation qui leur est dévolue. L’absence de l’Etat dans les quartiers pauvres tant en milieu urbain que dans les zones rurales offre un terrain fertile à la violence. Les criminels s’érigent en bienfaiteurs et tiennent en otage ces populations vulnérables. L’Etat de son côté ne fait montre d’aucune capacité ni de la volonté politique de venir en aide à ces communautés et de s’attaquer réellement au problème.

Les groupes criminels se multiplient un peu partout à travers le pays, des tueries sont orchestrées, des meurtres sont commis en plein jour tant à Port-au-Prince que dans les régions sous le regard impuissant et parfois complice des forces de l’ordre. Les cas les plus récents et les plus révoltants sont ceux de Cité soleil où un chef de gang a perpétré un vertitable massacre en assassinant froidement près de 200 personnes, en majorité des personnes âgées de plus de 60 ans, les accusant d’être responsables de la mort de son fils par des procédés maléfiques, à Pont sondé où le groupe criminel dénommé grand grif a assassiné plusieurs centaines de personnes. A petite rivière de l’Artibonite, à moins de 2 jours de l’annonce des autorités d’avoir repris le contrôle du commissariat de police abandonné depuis de longs mois, le groupe criminel contrôlant la zone a tué plus d’une dizaine de personnes dont des adolescents.

Ces atrocités commises à longueur de journée sur une population livrée à elle-même poussent les habitants de certains quartiers à developper des mécanismes d’autodéfense. D’où l’apparution du phénomène BWA KALE.

La lutte contre la criminalité en Haïti doit être intégrée. Elle requiert une approche systémique allant de l’amont vers l’aval. Elle doit être analysée en profondeur. Et, cette analyse doit être guidée par un ensemble de paramètres touchant l’économique, le social, la politique, l’anthropologique, etc. Et c’est là que la criminologie trouve sa place comme discipline qui, non seulement, étudie la criminalité, mais aussi contribue, de manière significative, à la sécurité publique en fournissant des connaissances et des outils pour comprendre, prévenir et contrôler les comportements criminels dans la société. C’est en ce sens que nous tentons d’explorer le rôle que cette discipline pourrait jouer dans l’éradication de ce phénomène en Haïti. 

Toute politique publique ayant pour but d’enrayer la criminalité en Haïti doit être articulée autour des axes suivants :

  • Comprendre les causes de la criminalité :

La criminologie se concentre sur la compréhension des causes sous-jacentes de la criminalité, des facteurs individuels, tels que la psychologie et la personnalité; des facteurs sociaux, tels que l’inégalité économique et l’exclusion sociale, la corruption et d’autres. En identifiant et en comprenant ces causes, les professionnels de la criminologie peuvent élaborer des stratégies de prévention et traitements plus efficaces pour lutter contre la criminalité dans le pays.

2) Élaborer des politiques et des programmes de prévention de la criminalité :

Sur la base de recherches et d’analyses criminologiques, des politiques et des programmes de prévention de la criminalité peuvent être élaborés pour s’attaquer aux causes sous-jacentes de la criminalité et en réduire l’incidence. Ces programmes peuvent inclure des initiatives d’intervention précoces, des programmes de réadaptation des délinquants et des mesures de sécurité communautaires, entre autres.

3) Améliorer l’application de la loi :

La criminologie fournit des connaissances et des outils qui peuvent améliorer la capacité des organismes d’application de la loi à enquêter et à résoudre les affaires criminelles. Cela inclut les techniques d’enquête criminelle, le profilage criminel, la technologie médico-légal et l’analyse des données pour identifier les modèles criminels et prévoir les tendances criminelles.

4) Promouvoir la justice et les droits de l’homme :

La criminologie promeut la justice et les droits de l’homme en plaidant pour des systèmes de justice pénale équitable et efficaces. Il s’agit notamment de garantir une procédure régulière, de protéger les droits des accusés et des victimes et de plaider en faveur des politiques et de pratiques qui réduisent     la discrimination et l’injustice dans le système de justice pénale.

5) Éduquer et sensibiliser la communauté :

La criminologie joue également un rôle important dans l’éducation et la sensibilisation de la communauté aux questions de criminalité et de sécurité publique. En fournissant des informations et des ressources nécessaires sur la prévention de la criminalité, la sécurité personnelle et les droits légaux. La criminologie peut permettre aux communautés de devenir des partenaires actifs dans la promotion de la sécurité publique.

En conclusion, la criminologie joue un rôle essentiel dans la promotion de la sécurité en fournissant des connaissances, des outils et des stratégies pour comprendre, prévenir et contrôler la criminalité dans la société. En s’attaquant aux causes sous-jacentes de la criminalité, en élaborant des politiques et des programmes efficaces, en améliorant l’application de la loi et en promouvant la justice et les droits de l’homme, la criminologie contribue à la création de communautés plus sûres et plus résilientes.

Luckner EDOUARD                                                                                                                                        Médecin Criminologue président société haïtienne de criminologie et d’études pénales (SOHACEP )                                                                                                                   Email : sohacep.ht@gmail.com                                                                                                           Tel : 509 31469494

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